dimanche 12 juin 2016

l'extraordinaire : sujet de synthèse et d'écriture personnelle n° 2



1) Vous ferez une synthèse concise, objective et ordonnée des documents suivants :

Document 1 :

Une robe de cuir comme un fuseau
Qu'aurait du chien sans l' faire exprès
Et dedans comme un matelot
Une fille qui tangue un air anglais
C'est extra
Un Moody Blues qui chante la nuit
Comme un satin de blanc marié
Et dans le port de cette nuit
Une fille qui tangue et vient mouiller

C'est extra, c'est extra
C'est extra, c'est extra

Des cheveux qui tombent comme le soir
Et d' la musique en bas des reins
Ce jazz qui jazze dans le noir
Et ce mal qui nous fait du bien
C'est extra
Ces mains qui jouent de l'arc-en-ciel
Sur la guitare de la vie
Et puis ces cris qui montent au ciel
Comme une cigarette qui brille

C'est extra, c'est extra
C'est extra, c'est extra

Ces bas qui tiennent hauts perchés
Comme les cordes d'un violon
Et cette chair que vient troubler
L'archet qui coule ma chanson
C'est extra
Et sous le voile à peine clos
Cette touffe de noir jésus
Qui ruisselle dans son berceau
Comme un nageur qu'on n'attend plus

C'est extra, c'est extra
C'est extra, c'est extra

Une robe de cuir comme un oubli
Qu'aurait du chien sans l' faire exprès
Et dedans comme un matin gris
Une fille qui tangue et qui se tait
C'est extra
Les Moody Blues qui s'en balancent
Cet ampli qui n' veut plus rien dire
Et dans la musique du silence
Une fille qui tangue et vient mourir

C'est extra, c'est extra
C'est extra, c'est extra

Léo Ferré, "C'est extra", 1969.

Document 2 :




Tout commence le 3 mai dernier, lorsque Taylor, envoyé en Afghanistan avec l'armée américaine, marche sur une mine anti-personnel... En une fraction de seconde, le jeune homme de 23 ans perd ses quatre membres (ses deux jambes au niveau des genoux, son bras gauche au niveau du coude et pareil pour son bras droit).
L'explosion, le vol plané, l’atterrissage, la douleur, Taylor n'a rien oublié de tout ça. Il se souvient même avoir vu que ses membres avaient disparu !
Malgré son état plus que critique, il parvient à appeler de l'aide et à être évacué par ses coéquipiers. Les jours qui suivent, il est rapatrié aux USA pour être soigné. 
Quand elle apprend cette nouvelle terrible, Danielle, sa petite amie est effondrée. Comment une chose aussi cruelle peut-elle leur arriver à eux ? Elle raconte : "On pense que ce sont toujours les autres qui se retrouvent dans ce genre de situation, mais cette fois-ci c'était bien nos vies qui ont été touchées."
Mais malgré la peine, la colère et les cauchemars, l'amour est sorti grand vainqueur de cette épreuve ! Les deux tourtereaux s'aiment autant si ce n'est encore plus qu'avant. La preuve, ils se sont même mariés !

Clément P., "L'histoire d'amour la plus incroyable du monde", demotivateur.fr


Document 3 :

L’amour n’est qu’une parenthèse pour les âmes exaltées.

« Au galop de quatre chevaux, elle était emportée depuis huit jours vers un pays nouveau. » Plus son mari ronfle fort à ses côtés et plus elle se réveille en d’autres rêves. Pétrie de lectures romanesques, elle se résigne pourtant à épouser le réel, elle choisit Bovary, le bovin qui engraisse et glousse en avalant sa soupe. Pourvu qu’il l’emmène au bal et si, là-bas, au milieu du luxe flamboyant des candélabres, le pantalon le serre au ventre et les sous-pieds le gênent pour danser, elle, au contraire, se glisse dans sa robe de barège comme elle entre dans le grand monde, si bien qu’elle y troque son être contre des « gouttes d’eau factices ». Au moment où Charles l’embrasse, elle l’en empêche : « Laisse-moi, tu me chiffonnes » et non pas « tu chiffonnes ma robe ». Par métonymie, elle ne se distingue plus du costume, du rôle, des illusions dont le bal, dont toute fête est porteuse. Haletante, elle « atten(d) le coup d’archet pour partir ». Partir où ? Le texte reste elliptique sur la destination, l’évasion est un non-retour.
Cependant « la soupe est servie », et « il fa(ut) descendre, il fa(ut) se mettre à table » ! La destinée tragique d’Emma réside dans la tournure impersonnelle, dans la chute qui succède toujours à l’envol, et surtout, dans cette assiette qui réduit toutes ses aspirations à une vie domestique sans désir. Demeurer auprès de Charles dont la « conversation est plate comme un trottoir de rue », s’enfermer dans les ronds de serviette que Binet fabrique pour se distraire, elle, la force qui va, bondit, exulte à chaque seconde ! La schwärmerei1 d’Emma se heurte aux circonstances ordinaires, avec son homme ce sera toujours la vacuité de la campagne, mais on ne revient pas sur son mariage. On pense que l’âge est venu de s’assagir, de se reposer dans des draps tièdes, des bras amis. 
On a beau se raisonner, l’extraordinaire continue à gronder à coups de bélier dans le sang. Et l’élan irrépressible rejaillit à la première occasion. Quand l’amant arrive, on se jette goulûment sur lui, on devient aveugle à toute vertu, on vend presque son âme pour payer un frisson. Le narrateur adopte le point de vue de celle qui se sent enfin femme dans la volupté là où le procureur Pinard blâme « la couleur lascive » du personnage : « J’ai un amant ! J’ai un amant ! Elle allait donc posséder enfin ces joies de l’amour, cette fièvre du bonheur dont elle avait désespéré. Elle entrait dans quelque chose de merveilleux où tout serait passion, extase, délire. » Le discours indirect libre, procédé encore inconnu des lecteurs, ne permet pas de déterminer l’origine des propos et, pendant le célèbre procès de 1857, Pinard les met au compte de l’auteur, il tient cette glorification de l’adultère comme plus dangereuse que le péché lui-même. La morale accusatrice ignore les feux follets qui lèchent l’amour « sans remords, sans inquiétude, sans trouble ».

1. Enthousiasme.

Gérard Bejjani, "Madame Bovary de Gustave Flaubert", lorientlitteraire.com

Document 4 :

Chercher l'extraordinaire, c'est chercher la plus grande intensité dans l'accomplissement de son désir. Il peut s'agir d'un désir de battre un record, de réussir socialement, de créer une œuvre, de s'enrichir, de s'unir à quelqu'un, etc. L'amour romantique présente les caractères de l'extraordinaire. Il est imprévu, d'une probabilité très faible (le philtre que Tristan boit avec Iseut par erreur), soit parce que la chance de tomber sur l'autre moitié est mince, soit parce que le coup de foudre s'oppose aux circonstances (Roméo et Juliette s'aiment alors que leur appartenance familiale devrait en faire des ennemis). Le deuxième caractère, la modification importante de la situation d'un ou plusieurs, est également présent. L'amour passion bouleverse la vie au point, souvent, d'entraîner une issue fatale (Roméo et Juliette, Manon Lescaut, Kleist1 et Henriette Vogel, Werther, etc.). Enfin, cette modification est accompagnée d'une émotion très forte. Selon un sondage L'Express-Science et Vie Junior de 2000, pour 10 % des adolescents, être amoureux veut dire vivre quelque chose d'extraordinaire. Pour la plupart d'entre nous, sans doute, l'expérience du grand amour est suffisamment rare et émouvante pour être jugée extraordinaire à l'échelle d'une vie.
La mort est un événement banal ("Il n'y a pas de plus grande banalité parmi les hommes que la mort", dit Nietzsche). Mais notre propre mort est un événement extraordinaire, le seul que nous commencerons à vivre sans jamais finir et sans le vivre avec certitude. Le seul (avec la naissance) qui ne peut jamais se répéter. Le seul qui excède la commune mesure de tout ce qui nous arrive, le fait d'exister. Dans la vie quotidienne, on a peine à y croire. Aimer c'est accepter cet événement car c'est trouver quelqu'un à qui on n'a pas envie de survivre (Pyrame et Thisbé, Roméo et Juliette). C'est accepter l'extraordinaire.

1. Ecrivain allemand de l'époque romantique qui s'est donné a mort avec sa bien-aimée Henriette Vogel condamnée par un cancer.

J. d'Astier, "L'Amour est-il extra ?", btsfrançais2010.com

2) Écriture personnelle :

L'amour est-il extraordinaire ?